Pandémie COVID 19 : We aren't ALL in this together !

Voici un mois que nous sommes entré.e.s en période de confinement suite à la propagation de la pandémie COVID-19 sur l'ensemble du territoire français.


Tandis que des mesures sanitaires safes ont peiné à se mettre en place : cacophonie sur le port du masque, unités hospitalières pas suffisamment équipées pour accueillir le nombre de malades suite à la contraction du virus, mesures gouvernementales qui ont pris du temps à être prises.


Cette période de confinement n'a fait que révéler de semaines en semaines, les inégalités auxquelles elle expose certaines populations :


- les plus précaires;

- les personnes malades et isolées;

- les personnes âgées;

- les femmes victimes de violences conjugales;

- les enfants victimes de violences éducatives;

- les personnels soignants;

- les Travailleur.s.e.s du Sexe;

- les indépendant.e.s et les auto-entrepreuneur.e.s.

- les personnes racisées.


La crise que nous traversons est révélatrice des difficultés sociales et économiques de notre société.


Une crise* est un phénomène singulier et particulier qui reste exceptionnel mais dont la gestion nécessite un traitement particulier en ce qu'il devrait, à l'issue de la crise, entraîner une prise de conscience ET des changements importants et bénéfiques.


Pendant que la plupart des français.e.s qui n'exercent pas une activité essentielle à la vie économique du pays sont en chômage partiel pour celleux qui sont salarié.e.s ou en suspension d'activités pour les indépendant.e.s ou les auto.entrepreneur.e.s, ou bien en télétravail quand leur activité professionnelle leur permet, nous nous sommes "aperçu.e.s" que les professions les plus essentielles à notre économie étaient les personnes qui sont le moins bien rémunérées :


- personnels soignants;

- éboueurs;

- technicien.n.e.s de surface;

- livreurs;

- hote.ss.e.s de caisse.




Dans ce contexte de pandémie, nous nous rendons aussi compte que ce sont ces personnes qui sont le plus exposées à contracter le virus et sont donc en danger.


En France, comme aux Etats-Unis, nous pouvons constater que les populations les plus exposées et les plus menacées par cette épidémie étaient les personnes racisées, car ce sont elleux qui exercent le plus souvent les métiers les moins bien rémunérés : comme les livreurs ou hôtesses de caisse, mais aussi parce que ces personnes ont moins bien accès aux soins et aux informations pouvant les tenir éloignées du danger.


En effet, il a été observé, alors que la France ne procède pas aux statistiques ethniques que dans le département du 93 (Seine Saint Denis), un excès de mortalité.

Je rappelle que le département du 93 serait considéré comme le département le plus pauvre de la France métropolitaine (hors DOM - TOM et Mayotte ...).


L'argument qui est avancé par les autorités sanitaires est qu'en raison de la pauvreté, la promiscuité et l'insalubrité de certaines habitations dans ce département, le virus circulerait plus rapidement et faciliterait donc la transmission.


Ce fort taux de mortalité s'explique également par le fait que les habitant.e.s de ce département font partie des personnels en première ligne et qui sont contraint.e.s à continuer de travailler, comme les aides soignantes, les aides à domicile et les personnels d'Ehpad.


Alors que la précarité et la paupérisation des habitant.e.s du département de Seine Saint Denis serait une des premières raisons pour lesquelles iels sont plus durement touché.e.s par le virus COVID 19, ce sont aussi ces populations qui sont le plus exposées à des contrôles de Police qui très souvent conduisent à des situations de violences policières :


- Ramatoulaye : "Je rentrais des courses, j'ai pris un coup de taser"


Par ailleurs, ces personnes qui travaillent dans des conditions à risque peuvent faire valoir, dans certaines conditions leur droit de retrait :


droit de retrait : situation au cours de laquelle un.e salariée décide d'exercer son droit de retrait et d'ainsi de ne pas occuper son poste de travail, sans l'accord préalable de son employeur, considérant que les conditions dans lesquelles iel travaille (temporairement ou non) la.le met en danger.


Le droit de retrait permet au salarié.e ou à l'agent public de quitter son poste de travail ou de refuser de s'y installer sans l'accord de son employeur.

Le droit de retrait peut s'exercer à deux conditions :


- la situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé;


- une défectuosité dans le système de protection est constatée.


Si la situation de danger est légitime l'employeur ne peut faire de retenue sur le salaire et/ou appliquer une sanction disciplinaire au.x salarié.e.s qui auraient pris la décision d'exercer leur droit de retrait.


***

La situation dans les DOM-TOM n'est pourtant pas en reste et fait aussi l'objet d'une situation sanitaire plus dangereuse pour certaines populations.


Pour les mêmes raisons que pour le département du 93, la pauvreté, la promiscuité et une plus mauvaise accession à la santé expliquerait pourquoi le virus COVID 19 serait plus virulent.


Par exemple à Mayotte, 80 % de la population vivrait en dessous du seuil de pauvreté et 30 % de la population n'aurait pas accès à l'eau courante.


Comme en Guadeloupe où il a été estimé que 60% de l'eau du territoire souffre régulièrement de coupures d'eau courante et parfois pendant plusieurs jours, car le réseau d'eau serait en réalité vétuste et n'a pas été entretenu.


La même île de la Guadeloupe dont le CHU a été victime d'un incendie en novembre 2017 et dont les travaux de réfection ne sont pas encore totalement effectués.


Ces deux situations sont inadmissibles concernant la situation sanitaire d'un département pourtant français !


Il y a une notion importante qui est très mal abordée voire pas du tout discutée en France et c'est la question des facteurs systémiques qui exposent de fait certaines personnes à des inégalités sociales et économiques.


- Tout le monde n'a pas accès ou les moyens d'acheter : de l'eau, de la nourriture et des médicaments qui sont pourtant au commencement de la pyramide de Maslow car ce sont des besoins fondamentaux et physiologiques.


- Tout le monde n'a pas les moyens de mettre de l'argent de côté sur un compte épargne pour prévenir les mauvais jours.


- Tout le monde ne dispose pas d'un toit où iels peuvent être en sécurité.


La question que l'on peut alors se poser est la suivante : pourquoi et comment le système n'est pas mieux préparé pour sauvegarder la sécurité et la santé de ses citoyen.n.e.s et de TOUT.E.S pas seulement celleux les plus privilégié.e.s.


***


Si les personnes noires et/ou racisées sont le plus exposées à la pandémie dans des pays comme les Etats-Unis ou la France, ce n'est pas parce qu'iels sont une population plus fragile, ce n'est pas parce qu'iels sont indiscipliné.e.s et qu'iels ont du mal à suivre les consignes sanitaires.


Si les personnes noires et/ou racisées sont le plus impactées par l'épidémie c'est en raison du racisme !


Des facteurs comme l'environnement de vie, l'éducation, le statut professionnel, les revenus, la stabilité ou l'instabilité du logement, avoir des revenus permettant d'avoir une alimentation régulière et équilibrée et l'accès au système de santé ont un impact sur la manière dont ces personnes traversent une crise comme celle causée par la pandémie COVID 19.


Le contexte dans lequel les personnes vivent détermine leur santé.

Il est complètement irresponsable de blâmer les personnes qui ont des faibles revenus ou qui vivent dans des conditions difficiles et de leur imposer d'avoir une bonne santé !


Le racisme ne se limite donc pas à parler d’incidents individuels ou interpersonnels MAIS aussi ET surtout sur ce système violent qui exclut, précarise et discrimine.


Quand on parle des territoires les plus touchés, il suffit de voir quelles personnes en sont les plus victimes pour comprendre qu'il s'agit de politiques historiques et géographiques racistes qui affectent ces personnes !


Ces mêmes territoires, où le reste de l'année, il y est constaté de forts taux d'échecs scolaires et/ou déscolarisation, où aussi un fort taux de personnes sans activités professionnelles peuplent ces territoires.


Ces mêmes territoires qui ne disposent pas de structures de santé suffisantes (manque de médecin généralistes), un accès à de la nourriture saine et variée et d'antennes d'écoute et de soutien pouvant utilement les aider à faire face à ces inégalités structurelles.


Ces territoires qui sont exposés à une violence économique et sociale.


Tous ces facteurs expliquent pourquoi ils ont une influence sur la santé !


Le racisme crée des inégalités sanitaires.

Le racisme structure et systémique affecte la santé des plus précaires et des populations les plus fragiles et les plus exposées.



***

Le 13 avril dernier, le président de la république Emmanuel Macron a prolongé la période confinement sur tous les territoires français jusqu'au 11 mai 2020.


Pendant encore 4 semaines, les crèches, les écoles, les collèges et les lycées resteront fermés et une éventuelle ré-ouverture de ces établissements à partir de 11 mai prochain.


A ce jour, les mesures sanitaires qui pourront garantir la sécurité des élèves et des enfants ainsi que du personnel scolaire (allant des enseignant.e.s au personnel de ménage) n'ont pas encore été dévoilées et feront l'objet d'une annonce prochaine.


Pendant près de deux mois, les parents se sont substitué.e.s à l'enseignement scolaire à la maison et là encore, on peut souligner des inégalités dans le suivi de la scolarité à distance :


- pour les enfants dont les parents n'ont pas accès à une connexion internet;

- pour les enfants dont les parents ne maîtrisent pas la langue française;

- pour les enfants dont les parents n'ont pas la capacité de se substituer aux enseignant.e.s;

- pour les enfants en situation de handicap qui ne disposent pas de support adaptés dans la continuité pédagogique (malentendant.e.s, aveugles etc);

- pour les familles mono-parentales;


Là encore, le confinement n'est pas une expérience égalitaire et expose certaines populations à des difficultés et/ou à des risques.

Au sortir de cette crise certaines conséquences seront à déplorer.


Egalement, il a été constaté après deux semaines de confinement une hausse de plus de 30% des violences conjugales et des mesures d'urgence ont dues être prises pour protéger les personnes victimes de ces violences avec le numéro 119 en renfort du 3919.


***

Pendant cette période de confinement, une tendance à la romanisation s'est développée.

Tandis que les plus privilégié.e.s et celleux qui peuvent rester en sécurité chez elleux une tendance émerge.

Vivre en période de confinement.

Partir dans sa maison secondaire en période de confinement.

Raconter comment quand on est bourgeois.e on vit cette période de confinement.


Des conseils sont même donnés ça et là pour vivre de façon "glamour" le confinement à l'adresse des femmes essentiellement qui, même pendant cette période, sont enjointes à performer leur rôle de maîtresse de maison.


Comment bien vivre cette période de confinement quand on se retrouve à 5, comme cette famille, dans 11m²???


Là encore, au-delà du caractère exceptionnel, cela soulève la question du mal logement et des prix des loyers trop élevés !


Pendant cette période, une hausse des publications grossophobes ont émergé ! Comme si la préoccupation de cette crise et l'ennemi était de devenir gros.s.e !


Sans oublier les actes racistes dont ont été la cible les personnes asiatiques quand l’épidémie a commencé à gagner la France !


Ce que ces comportements révèlent c'est le fait une nouvelle fois de constater que nous vivons dans une société : SEXISTE / RACISTE / VALIDISTE / GROSSOPHOBE/ PUTOPHOBE et CLASSISTE !


Il y a clairement plusieurs expériences de confinement et celles qu'on aimerait plus voir sont celles des personnes exclues, précarisées et invisibilisées !



***

Le confinement apporte cependant du positif et je ne l'oublie pas :


- la création et l'organisation d'initiatives solidaires, comme l'existence de cagnottes comme celle que j'ai relayé sur le site de mon association SORORE ENSEMBLE et qui a mobilisé autour d'une personne travailleuse du sexe et dont cette crise éprouve;


- la création d'antennes psychologiques d'écoute pour les personnes isolées et pour qui cette période de confinement peut s'avérer encore plus difficile qu'à la normale;


- soutien aux petites entreprises et auto-entrepreneur.e.s par des actions et de la visibilité de leur travail et actions, où là encore sur SORORE ENSEMBLE, je donne des renseignements juridiques et des démarches administratives.





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